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SURREALISME Manifeste

En 1924, André BRETON tire un trait sur Tristan Tzara et le mouvement dada, et fonde un tout nouveau paradigme artistique : le surréalisme. Le 15 octobre, Breton publie le premier Manifeste du surréalisme, qui inspirera des générations d’artistes à venir.

Quitter le mouvement Dadaïsme

Désillusionné de l’apathie des dadaïstes, surtout de Tzara, qu’il a longtemps admiré, fort d’une popularité littéraire considérable et d’un cercle de collègues proches très impressionnant (comptant entre autres Louis Aragon, Robert Desnos, René Crevel et Francis Picabia), Breton quitte une fois pour toutes Dada en publiant le Manifeste du surréalisme.

Ce qui se voulait au départ une préface à son ouvrage Poisson soluble est finalement un livre à lui seul, qui détaille tout d’abord le cheminement de la littérature moderne jusqu’au moment de sa publication, et donne ensuite une première définition du surréalisme.

Définition de l’automatisme

Tel que défini par André Breton, le surréalisme est : « [L’]automatisme psychique pur, par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. »

Le ton est donc lancé : dans cette définition, on retrouve à la fois des notions de psychanalyse, si chère à Breton, l’idée d’écriture automatique et d’écriture de l’inconscient, ainsi que celle de la liberté morale et esthétique. Peu de mouvements artistiques ont auparavant englobé l’art sous toutes ses formes : par la définition même du surréalisme, Breton invite à se joindre à ses collègues et lui des artistes de tous horizons.

Philosophie du MANIFESTE

Élisabeth Kennel-Renaud, spécialiste de Breton et du surréalisme, scinde le Manifeste en 9 éléments, parmi lesquels le principe de l’écriture automatique ; l’appel à l’émerveillement ; l’hommage à l’imagination.

Le manifeste en lui-même est surréaliste : hétéroclite, il contient des passages purement théoriques, et d’autres d’écriture, comme celui que Kennel-Renaud décrit par l’appellation « collages de fragments de phrase », qui rappelle le procédé d’écriture surréaliste du Cadavre exquis.

Kennel-Renaud note aussi dans le manifeste une section qu’elle nomme : « Foi en la résolution du conflit entre rêve et réalité ».

En écriture comme au cinéma et dans l’art visuel, les surréalistes tenteront de connecter ces deux sphères de la conscience, que ce soit par l’abolition de la narration chez Buñuel, ou bien par les procédés de récit de rêves et d’écriture sous hypnose.

Premier MANIFESTE surréaliste

Hommage à l’imagination, au rêve et à la liberté, le premier manifeste surréaliste annonce de belles années à venir pour les artistes du mouvement d’André Breton.

Dans le Second manifeste du surréalisme (1930), Breton se fera plus radical : rappelant que le surréalisme ne se réclame d’aucune morale et rejette tout endoctrinement politique, il en appelle cependant à l’implication sociale de tout artiste, ainsi qu’au rejet de l’appât du gain. Ce manifeste, qui critique plusieurs surréalistes actifs à l’époque, fait l’objet, entre autres, d’une solide réplique de Robert Desnos qui, dans Corps et Biens (1930), déplore la fin douloureuse, mais nécessaire d’une belle aventure.

Artistes surrealistes

Les branches du surréalisme : le rêve versus l’abstraction

Alors que nombre d’artistes surréalistes cherchent à recréer le monde onirique des rêves, l’autre moitié des membres se verse plus dans un art qui avoisine, et qui contribuera à donner plus tard, l’expressionnisme abstrait.

Un mouvement aussi étendu et rassemblant autant d’artistes que le surréalisme ne peut pas suivre une ligne esthétique, ou même philosophique, très serrée : tant d’esprits créateurs convergeant sur une même théorie sont voués à diverger à un moment où à un autre. De plus, le surréalisme, dont les trois mots d’ordre sont amour, liberté, poésie, laisse place à l’inventivité et à l’originalité.

Les illusionnistes

La première branche, que l’on pourrait qualifier d’illusionniste, rassemble des artistes tels que Salvador Dalí, René Magritte, Yves Tanguy et Max Ernst.

Moins intéressés par l’interprétation des rêves que par la capacité créatrice possible grâce à ceux-ci, les illusionnistes veulent créer des représentations réalistes d’état de sommeil ; dans leurs œuvres, les membres de cette branche du surréalisme incorporent des éléments de la nature, des animaux et même des figures humaines.

Cependant, à la manière des éléphants en échasses ou des montres coulantes de Dalí, les éléments réalistes tels qu’on les connaît subissent souvent des modifications hors de l’ordinaire dans ces toiles surréalistes. Les artistes de cette branche cherchent à créer un inconfort chez le spectateur, que ce soit en déformant l’ordinaire ou bien en associant des objets qui n’ont rien à voir dans la réalité, comme dans le Toréro hallucinogène de Dalí, dont la tête est imprimée entre deux Vénus de Milo, ou bien encore dans l’Invention collective de Magritte, qui présente une absurde figure à corps de poisson et à jambes d’homme.

L’abstraction

Les artistes qui ne penchent pas du côté de l’illusion penchent plutôt de celui de l’abstraction.

Parmi les partisans du surréalisme abstrait, on compte par exemple Joan Miró, André Masson, Roberto Matta et certaines œuvres de Max Ernst, qui ne se classent pas dans l’illusion. Les œuvres de cette branche du surréalisme se caractérisent entre autres par leur automatisme aigu, qui élimine toute représentation figurative, pour permettre à l’auteur — et par le fait même au spectateur — de comprendre pour lui-même les éléments et l’univers d’une œuvre.

Jouant avec les formes et les couleurs, l’Oiseau lunaire et les autres sculptures que Miró produit juste après la Seconde Guerre mondiale ne ressemblent à rien d’autre vu en sculpture jusque-là.

Dans les années 30, juste avant la Seconde Guerre mondiale, plusieurs artistes européens, dont certains surréalistes, doivent fuir l’Europe pour moult raisons et s’embarquent donc pour l’Amérique. Cette vague d’immigration aura une part d’influence sur l’émergence, dans les années 1940, à New York, de l’expressionnisme abstrait.

Le surréalisme abstrait aura été un passage entre surréalisme pur et expressionnisme abstrait, dans lequel s’égareront, l’espace d’une toile ou deux, d’aussi grands noms que Jackson Pollock, Arshile Gorky et Robert Motherwell.

pipe magritte

L’écriture surréaliste

Prônant le hasard et l’écriture du subconscient, libre de toutes barrières psychiques, le surréalisme se développe tout d’abord en littérature.

Dès 1913, André Breton, père du surréalisme, expérimente avec l’écriture automatique, procédé qui caractérisera l’écriture surréaliste, en cherchant à laisser la voix de l’inconscient s’exprimer sans bornes et sans logique.

Les récits de rêve, les cadavres exquis et l’écriture sous hypnose sont tous d’autres techniques utilisées par les surréalistes pour mêler le hasard et l’inconscient à l’écriture.

Écriture automatique

Pratiquée par la plupart des écrivains surréalistes, l’écriture automatique consiste à laisser champ libre à son cerveau, notant toute pensée spontanée sur du papier avant que la logique ne s’en empare et ne la reformule.

Le plus passif est l’écrivain, le plus l’écriture sera automatique — c’est du moins ce qu’affirme Breton, qui expérimente avec ce procédé dès 1913, soit presque une dizaine d’années avant les débuts du surréalisme. Son texte Les Champs magnétiques, publié en 1920, a par ailleurs été presque complètement rédigé selon le procédé d’écriture automatique.

Intimement liée à l’intérêt que porte André Breton à la psychanalyse et aux théories de Freud, l’écriture automatique doit faire parler le subconscient, et même l’inconscient, avant que le sur-moi, portion psychique de chaque homme sujette aux pressions et restrictions sociales, ne s’en empare.

Elle s’inscrit dans le mouvement surréaliste puisqu’elle est avant tout le surpassement du réel. Elle pénètre au-delà de la motivation visible à l’homme. Elle donne l’opportunité à l’artiste qui veille en nous de s’exprimer. Le chef-d’œuvre est notre propre imagination fécondée, en isolant les matériaux considérés. Les lois littéraires ne sont pas crédibles et la grammaire fonctionnelle n’a aucune place dans l’écriture automatique.

L’écriture obtenue, parfois transcendante, n’en reste pas tout du moins sans un côté absurde, qui défie la logique. C’est un jargon, fabriqué puis retranscrit sur papier.

En ce sens, elle se rapproche de la « Pataphysique d’Alfred Jarry, science théorisant la reconstruction du réel dans l’absurde. Jarry, tenu en haute estime par les surréalistes, et surtout par André Breton — qui a déclaré que le dramaturge était un véritable surréaliste, par sa consommation d’absinthe, mais aussi par sa vision du monde — n’est pas si loin des surréalistes dans son écriture volontairement absurde, qui affirme par exemple que : « Dieu est le plus court chemin de zéro à l’infini, dans un sens comme dans l’autre ».

L’esprit saisit la main du medium pour entrer en contact avec le monde physique. Il écrit et dessine. Aucune liaison n’est visible, aucune union n’est en accord avec ce qui pourrait être un « vrai texte ». C’est un moyen intermédiaire de lâcher prise en utilisant une autre manière transmettre sa pensée. Une forme de dictée inconséquente.

En effet, les parapsychologues, les psychologues et les spirites sont de nos jours les plus propices à utiliser ce procédé.

Elle est d’ailleurs encore et souvent adoptée pour recueillir ce qu’on sait d’un sujet lors d’un remue-méninge.

Récits de rêve et écriture sous hypnose

Comme l’écriture automatique, les récits de rêve, sous hypnose, ou bien encore sous influence (de drogues, d’alcool) visent à éliminer le plus possible le contrôle du flux de l’écriture. L’écrivain se retrouve donc complètement illimité dans ses possibilités.

Plusieurs auteurs surréalistes, encore une fois intrigués par les théories psychanalytiques de l’époque, se sont intéressés au lien entre les récits de rêve et le « fil conducteur » les liant à la réalité.

Cadavre exquis

La seule règle de cette technique d’écriture ludique, largement reprise aujourd’hui comme jeu, dans tous les contextes, est de suivre la formule grammaticale suivante : nom, adjectif, verbe, complément d’objet direct, adjectif.

Sur une feuille pliée, où les participants ne peuvent voir le mot inscrit par le joueur précédent, ils doivent inscrire un mot de leur choix, qui respecte l’ordre indiqué plus haut.

Des phrases loufoques sont ainsi obtenues, telles que celle qui donna son nom au jeu (« Le cadavre exquis boira le vin nouveau ») ou bien encore : « Le pain blanc secouera le sein oblong qui rit ». Ce dernier cadavre exquis est également l’un des premiers obtenus : lors de la première rencontre des surréalistes où le jeu est pratiqué, sont présents entre autres André Breton, Jacques Hérold, Victor Brauner, Yves Tanguy, Benjamin Péret et Elsie Houston.

Derrière ce « hasard objectif », en apparence inoffensif, se cache bien évidemment une réflexion esthétique plus poussée : en opposition à l’écriture automatique, où l’écrivain joue seul avec son inconscient, et qui se rapproche donc de la psychanalyse, le cadavre exquis permet à la fois une réelle intrusion du hasard dans l’écriture ainsi que la découverte, purement poétique, de nouvelles associations de mots impensées.

Des techniques qui traversent les médias

L’automatisme, la place du hasard et de l’inconscient ne sont pas des caractéristiques exclusives à la littérature surréaliste : elles se retrouvent également dans tous les autres types d’art que touche ce mouvement.

L’écriture automatique trouve son équivalent dans le dessin automatique, pratiqué par exemple par André Masson, peintre français des années 1920-50.

Le cadavre exquis, également, est aussi bien pratiqué avec des mots qu’avec des parties du corps ! Les collages de Max Ernst ou les œuvres photosensibles de Man Ray rappellent également l’aspect rapiécé du cadavre exquis.

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